Le bureau des Mésarchitectures
Stream : Du LAPS, votre agence a évolué vers le « Bureau des Mésarchitectures », le nom de votre agence aujourd’hui, que signifie « mésarchitectures » ?
Didier Fiuza-Faustino : En créant le Bureau des Mésarchitectures, nous sommes passés de l’adolescence à l’âge adulte. Nous parlions de stratégie tout à l’heure, à l’agence nous essayons d’anticiper sur ce qui va arriver. Avec notre positionnement qui s’est construit comme une nébuleuse, un pied dans l’art et l’autre dans l’architecture, nous avons accès aujourd’hui à un nouveau type de commande. Tout le travail réalisé en amont, nous a permis de nous rendre compte que l’on a les clients qu’on mérite. De plus en plus de maîtres d’ouvrage exceptionnels viennent nous chercher, que ce soit avec les collectivités locales ou le milieu de la mode, avec son économie particulière, on arrive à préserver une certaine intégrité grâce à ce besoin permanent d’expérimenter. J’aime bien la série X-Files, non pas pour sa réalisation, mais plus pour le sous-titre du générique : « La vérité est ailleurs » ! J’ai souvent envie d’introduire les discussions avec tout nouveau client par ce postulat : ce que vous demandez ne correspondra pas forcément à ce que vous aurez en définitive. C’est en quelque sorte l’anti-thèse du « WYSWYG » (What You See is What You Get), que nous traduisons au Bureau des Mésarchitectures par What You See Is not What You Get !
C’est ainsi qu’on se positionne et nos clients sont de plus en plus aptes à prendre ce risque et à nous suivre dans cette logique. Un des derniers exemples est le projet réalisé pour le CCA de Kitakyushu au Japon, (Center for Contemporary Art) qui était au départ loin d’être gagné. On a déprogrammé les attentes initiales et c’est cette démarche préalable que les architectes ne font plus depuis des années, cette faculté à renverser un programme, à le repenser, qui a guidé notre intervention. C’est une force qu’il faut savoir développer, car pour nous, il est impensable d’accepter un programme qui arrive tout fait sur la table. La plupart du temps, il est défini par rapport à un existant, un faux-semblant d’analyse, plus que comme quelque chose qui doit être pensé dans son unicité. Or, l’architecte produit de l’unique, c’est en ce sens que le processus de création architecturale rejoint celui de l’artiste.
Stream : Quelle est votre stratégie face aux concours ?
Didier Fiuza-Faustino : Jusqu’à présent nous avons eu la chance d’accumuler les demandes de participation à des concours. Nous nous intéressons davantage aux sujets, moins au système même des concours. Celui de la Cité du Design de Saint Étienne, nous a réellement passionné, et pour celui-ci nous avions été retenus sans aucune référence. nous aimions bien l’aspect hybride et complexe du programme-totalement contemporain – qui consistait à réunir une école, un centre d’art, un musée et une galerie marchande. La matérialisation du programme ne nous satisfaisait pas et l’histoire ne fonctionnait pas, alors nous avons travaillé sur une architecture de la répétition, sans finitude. Une architecture figée à un moment donnée, mais qui pouvait se gangrener au fil du temps.
Stream : La majeure partie de votre production est mise en scène dans l’espace muséal, soit par intervention directe et spécifique dans le Musée ou alors par l’exposition de « pièces » de collection d’architecture expérimentale. Peut-on parler d’une stratégie d’exposition, si l’on prend en compte le fait que les musées soient devenus des monuments incontournables et fédérateurs de l’économie des villes contemporaines ?