Coévolutions urbaines

  • Publié le 7 octobre 2021
  • Pascal Picq
  • 20 minutes

La perspective du paléoanthropologue est celle du temps long : Pascal Picq analyse l’évolution de la lignée humaine au regard de celle de son habitat. Il met notamment en lumière la façon dont l’évolution des modes de travail, tout au long de l’histoire, a constitué un moteur de transformation radicale des formes urbaines. Estimant que les conditions sont aujourd’hui réunies pour une phase de l’évolution de la ville, il plaide pour de nouveaux nomadismes, en termes d’habitat et de modes de déplacement, ainsi que pour des modes de vie organisés selon des modèles de fusion-fission. Il prône également le retour de l’anthropologie dans la ville, afin de permettre sa réappropriation par les habitants.

En tant que paléoanthropologue, vous avez étudié l’histoire et l’évolution des villes au regard de l’évolution de l’espèce humaine. Avec la profondeur historique de ce regard, avez-vous le sentiment que nous visons un moment charnière de crise ou d’accélération des enjeux urbains ?

La difficulté avec cette vision du temps long propre aux paléoanthropologues est qu’elle est difficile à partager, car nous parlons de milliers, voire de millions d’années, qui restent des échelles temporelles compliquées à appréhender. L’Histoire avec un grand H commence par les premières cités des âges des métaux, il y a environ 6 000 ans au Proche-Orient, alors que notre espèce arpente la Terre depuis au moins 300 000 ans. La compréhension de l’évolution est par ailleurs marquée par le biais des schémas que nous avons hérités du xixe siècle, où les idées de progrès et d’évolution deviennent consubstantielles, portant l’idée sous-jacente d’une grande transformation régulière, qui s’inscrit dans le temps très long, cumulative, méliorative et orientée vers un but : l’événement de notre espèce Sapiens et, pour l’histoire, de notre civilisation occidentale. Or, l’évolution relève davantage de ce que nous appelons les « équilibres ponctués », une théorie développée dans les années 1980, notamment par Stephen Jay Gould. Nous avons compris que l’évolution n’a rien d’un long fleuve tranquille, qu’elle peut recouvrir de longues périodes de stabilité relative, des périodes de changements assez réguliers, sans oublier de multiples divergences. Pour les villes, de Jéricho aux mégalopoles actuelles distribuées dans le monde, difficile d’évoquer une histoire linéaire, régulière et progressiste, ne serait-ce que pour la qualité des bâtiments ou l’urbanisme.

Je discutais récemment avec des dirigeants qui m’expliquaient à quel point ils avaient le sentiment que tout allait vite aujourd’hui. Mais, vu mon âge, je peux leur rappeler qu’en 1964 ont été décidés dans le même Conseil des ministres le TGV, Airbus et le nucléaire. Quatre ans plus tard, nous vivions Mai 68, puis l’élection de Valéry Giscard d’Estaing six ans après. La France a basculé dans la modernité en douze ans. Je ne dis pas cependant que les choses ne vont pas plus vite aujourd’hui, car c’est probablement le cas. Je rappelle qu’il s’est passé dix ans entre l’arrivée des premiers smartphones et l’idée de smart cities. Les voitures dans les villes, du temps de ma jeunesse ; aujourd’hui, les voitures hors des villes. Le point central est que les changements se font désormais à l’échelle mondiale et de manière simultanée. Néanmoins, l’accélération ne se fait pas sur les ponctuations, mais bien entre ces périodes de ponctuations, dans celles de relative stabilité ou d’évolution progressive, comme au cours du dernier demi-siècle. Nous ressentons le choc des changements dont nous sommes acteurs, mais les périodes de basculement dans une autre civilisation sont en général de l’ordre d’une ou deux décennies. Un fait difficile à expliquer dans l’évolution des espèces comme dans l’histoire des sociétés humaines, mais il y a de fait des convergences adaptatives dans des lignées ou civilisations indépendantes et séparées géographiquement. Autour du premier millénaire avant notre ère émergent au Proche-Orient puis en Europe, en Inde, en Chine, en Afrique et en Méso-Amérique de grande cités-États au centre de nouvelles civilisations, avec des systèmes de pensée théologique et philosophique toujours présents dans nos sociétés. Nous parlons d’« âge axial », celui des grandes cités de l’Antiquité.

Et avant l’âge axial ? Il est par exemple troublant de constater que l’arrivée des âges des métaux, l’âge du fer surtout, au Proche-Orient et ailleurs dans le monde, marque en quelques siècles un changement historique profond, mais que nous en avons peu de traces archéologiques. C’est cela la ponctuation. Chez Stephen Jay Gould et ceux qui participaient à cette nouvelle conception de l’évolution générale, l’idée de ponctuation sous-tendait que l’absence de données n’impliquait pas nécessairement qu’il n’y ait pas eu de transition, mais simplement que ce sont des périodes trop courtes pour que nous ayons la probabilité d’en trouver des traces. Pourtant, sur ces quelques siècles, notamment au Proche-Orient, de nouvelles villes et cités émergent soudainement, accompagnées d’influences économiques et politiques au niveau d’un demi-continent, ce qui ne peut se faire sans de profonds changements économiques, philosophiques, politiques et religieux. C’est ce que nous devons questionner aujourd’hui : quels changements fondamentaux sommes-nous en train de vivre ? Quel nouvel âge axial ?

Pour ma part, je crois que ce qui est en train d’émerger est une nouvelle réflexion sur la façon dont le travail et son organisation changent la ville. La ville et l’urbanisme ont toujours couru après la transformation du travail, et il me semble que c’est ce à quoi nous assistons, qui est d’ailleurs l’inverse de l’utopie classique, avec ses récits qui avaient tendance à organiser strictement les choses, chacun à sa place dans ses activités et dans ses lieux de vie. De ce point de vue, ma génération est passée quasiment du Néolithique au transhumanisme, et j’explique souvent à ceux qui ont moins de cinquante ans que la leur est la première à avoir massivement connu comme organisation principale de la société une séparation totale entre le lieu de travail et le lieu de vie privée – la trilogie « métro-boulot-dodo ». Ce sont également les premières générations à avoir vécu dans des habitats dotés du confort sanitaire. Ce schéma n’a même pas cinquante ans. À partir de là, si nous nous plaçons dans une grande perspective, je crois que les mécanismes d’une évolution sont en place. Par rapport aux prospectivistes, les évolutionnistes ne disent pas ce qui va se passer. En revanche, nous savons que lorsqu’un certain nombre de conditions se mettent en place, le changement advient. C’est ce que nous appelons un « algorithme » ; il y aura forcément un résultat, mais nous ne savons pas lequel. Et les villes sont au cœur de ces transformations en cours.

Je crois que c’est ce que nous sommes en train de connaître, l’algorithmique est partie, tout va changer, avec le télétravail, et plus largement les formes de travail à distance, comme accélérateur, sans oublier les multiples plateformes de services. Mais ce changement ne concerne pas tous les métiers, par exemple ceux de proximité, mis à rude épreuve pendant la pandémie et qui, trop souvent, sont exercés par des personnes vivant loin de leur lieu de travail, en raison de difficultés financières pour se loger « en ville ». Par rapport aux études prospectives de ces dernières années, il semblerait que la crise pandémique a fait « gagner » cinq ans quant aux changements que nous allions connaître dans la société autour des nouveaux modes de travail. Et évidemment, la ville va être complètement percutée par cela. Nous sommes déjà entrés dans une nouvelle période de l’évolution de l’humanité depuis 2007, depuis que la majorité des populations « sapiennes » sont urbanisées.

Pourriez-vous dresser une grande fresque de cette évolution de Sapiens au regard de son habitat ?

Replaçons cette évolution dans une grande perspective temporelle : à l’origine existaient des populations de chasse et de collecte. Nous savons maintenant que les femmes chassaient et que les hommes collectaient, que les organisations sociales étaient beaucoup plus diversifiées que nous ne l’imaginions. Ces populations s’installaient quelque part, les femmes davantage autour du lieu d’habitat, et les hommes occupant des activités plus centrifuges. Mais gare à nos clichés hérités du xixe siècle – les femmes au foyer et les hommes au boulot –, à peine ébranlés depuis deux décennies, que ce soit pour les sociétés du passé comme pour celles d’aujourd’hui. Dans les économies de chasse et de collecte – j’évite de parler de « chasseur-collecteur » –, l’habitat est assez peu résidentiel, il bouge au gré des circonstances, surtout des saisons et des ressources. Parmi ces économies de prédation des ressources naturelles, certaines disposent de ressources abondantes et deviennent plus sédentaires, voire développent de véritables civilisations. Nous pensons classiquement que la civilisation est synonyme de la ville, mais, depuis trente ans, nous nous apercevons qu’il n’en est rien. Cela ne remet pas en cause l’importance de la ville et des civilisations urbaines, mais il a bel et bien existé des civilisations sans la ville.

Nous parlons de sociétés fondées sur des économies de chasse et de collecte bénéficiant souvent de conditions écologiques assez particulières, avec une saison de très forte productivité des ressources végétales et/ou animales (par exemple, les peuples amérindiens du nord-ouest des États-Unis et la migration du saumon, qu’ils fumaient). Ces sociétés, capables de conserver la nourriture, de la stocker, de créer des richesses, deviennent davantage sédentaires. Elles ont des zones d’activité élargies qui les amènent à exercer des pillages, des guerres et également l’esclavagisme des hommes et des femmes. L’habitat devient plus concentré, pérenne, presque sédentaire, ce qui est très intéressant. Ce type d’économie existaient chez certaines populations il y a encore un siècle.

Pour nous, Homo sapiens, que nous appelons Cro-Magnon en Europe, évoque les sociétés du Paléolithique supérieur et leurs grottes ornées, même si ce sont surtout les entrées des grottes qui étaient aménagées et décorées. Ce sont également de grands villages avec des lieux de spécialisation, un peu comme les villages des Amérindiens remplis de tipis ou des huttes, notamment dans les plaines d’Ukraine où le bois était rare. C’est le début de l’architecture avec des constructions absolument extraordinaires faites de tibias, de fémurs, d’omoplates et de défenses de mammouth, des appareillements magnifiques, et des cabanes beaucoup plus grandes que d’autres, que nous pensons être des bâtiments dédiés à la vie collective, cultuelle et/ou politique.

Pourquoi parlé-je de cela ? Parce que, comme pour l’âge axial ou notre époque, ces constructions répondaient à de nouvelles conceptions du cosmos et de la société, de nouvelles représentations du monde. Après la fin du dernier âge glaciaire, le Mésolithique, période qui a longtemps été négligée parce que perçue comme intermédiaire entre le Paléolithique et le Néolithique, a vu évoluer des sociétés d’économie de chasse et de collecte dont nous avions mal compris l’importance. Nous savons désormais qu’il existait des civilisations allant de l’Atlantique à l’Oural du temps de Lascaux, sans parler de celles pour lesquelles nous avons moins de données. Au Proche-Orient, durant ce Mésolithique – non pas que le Proche-Orient ait tout inventé, mais c’est là que cela semble avoir commencé, et surtout là où nous possédons le plus de données grâce à des fouilles nombreuses –, nous voyons se mettre en place de grands centres monumentaux, notamment en Anatolie, comme à Göbelki Tepe, et de grandes constructions, des temples presque aussi impressionnants qu’à Mycènes. Ces constructions sont très géométriques et dévoilent des représentations d’animaux d’ailleurs assez belles. Ceci se passe il y a douze mille ans, c’est-à-dire que les agricultures ne se sont pas encore inventées. Cela nous amène à repenser l’histoire de la ville, parce que, tout comme dans les cités amérindiennes d’ailleurs, ces grandes cités avec des pyramides, il n’y avait pas d’habitat autour. Ces lieux d’expression des croyances et de cultes faisaient la cohésion de ces sociétés de fusion-fissionEn éthologie, une société à dynamique de fusion-fission est une société dans laquelle la taille et la composition du groupe social évoluent selon le moment ou l’environnement dans lequel les animaux se déplacent : les animaux se regroupent (fusion), par exemple pour dormir ensemble, ou se séparent en sous-groupes (fission), par exemple pour chercher de la nourriture en petits groupes pendant la journée. Dans ce type d’organisation sociale, la composition des groupes est en constante évolution., entre leurs composantes de groupes ayant encore une économie de chasse et de collecte. Les conditions écologiques favorables de la période postglaciaire sont certainement à l’origine du mythe du paradis perdu ; les abondantes récoltes de céréales sauvages ont pu être traitées, stockées, transformées, redistribuées, et cela bien avant le modèle paysans-prêtres-guerriers et ses règles pré-étatiques. Une ou plusieurs fois par an, les sociétés des Amérindiens du nord-ouest d’Amérique du Nord se réunissaient dans une formidable cérémonie de dons, d’échanges et de consommation. Nous découvrons ainsi que ces rituels s’accompagnaient, il y a plus de dix mille ans, d’organisations sociales capables d’édifier de grands ensembles monumentaux à cet effet.

Les populations encore semi-nomades ont été capables, pendant deux ou trois mille ans, d’organiser leur société pour mettre en place, autour des économies de chasse et de collecte, des organisations du travail et des objectifs qui amenaient à mobiliser un nombre considérable d’hommes et de femmes pour construire ces édifices. Nous avons toujours conçu les origines de la ville au travers des grands changements économiques et de leurs conséquences, mais nous avions complètement négligé l’aspect des représentations collectives comme la religion (qui a pour source « relier »). Ce qui est intéressant est que, jusqu’au Néolithique environ, même s’ils sont capables d’édifier de grands bâtiments, d’organiser des sociétés à l’échelle d’une région importante, les peuples recourent assez peu à des matériaux solides, des pierres, etc., pour leurs habitations, et restent relativement nomades. À l’arrivée du Néolithique, les sociétés commencent à stocker des végétaux et à les conserver. Ce n’est qu’à ce moment que nous verrons apparaître un habitat concentré pour se protéger du monde extérieur, comme les pueblos ou, en France, les bastides. Les murs d’enceinte apparaissent ensuite assez rapidement, et les activités socioéconomiques s’organisent autour de ce noyau.

Après le long Néolithique arrive la révolution soudaine des âges des métaux, et bientôt l’âge axial, qui voit se construire des villes dont nous sommes encore aujourd’hui les héritiers, où les pouvoirs religieux et séculiers sont installés au centre dans des édifices ostentatoires. Les cités sont souvent protégées par des murailles. Elles exercent une mainmise sur les ressources qui les entourent tout en développant des réseaux commerciaux et des alliances sur de longues distances. Cela va durer quasiment sept à huit mille ans dans le monde occidental, période pendant laquelle les formes urbaines et les organisations sociales ne vont quasiment pas changer, avant les révolutions bourgeoises de la fin du xviiie siècle, puis la révolution industrielle.

À partir de 1765, du côté de Birmingham, dans les Midlands, soit le middle of nowhere comme on le dirait en bon américain, des individus complètement imprégnés de l’esprit des Lumières décident de se réunir une fois par mois pour échanger autour d’un bon dîner (je le dis souvent, l’innovation, c’est avant tout un bon repas, ce qui donne à penser quand on réfléchit au télétravail…). Ces gens-là se réunissent les soirs de pleine lune, ce qui donnera le nom de Lunar Society, mais sans spiritisme aucun, comme ce pourra être le cas un siècle plus tard. Nous rencontrons là Erasmus Darwin, le grand-père de Charles, premier médecin moderne, qui correspondait avec les grands esprits de son temps, ami d’Adam Smith, de William Godwin… Un autre de ses amis, qui vient le voir dès qu’il passe en Europe, à l’époque par marine à voile, n’est autre que Benjamin Franklin. Ils publieront ensemble sur l’électricité. Dans ce groupe, nous surprenons également Matthew Boulton, qui organisera la première manufacture mécanisée au monde acommpagné d’un personnage qui les a rejoints, James Watt. Ils perfectionneront les machines à vapeur, notamment pour régler le problème des inondations dans les mines, jusqu’à concevoir des machines qui pour la première fois produiront de la puissance mécanique dans les manufactures. En effet, contrairement à ce que l’on croit, la mécanique n’a pas vu le jour dans le textile ni dans les hauts fourneaux, mais dans la poterie, plus particulièrement avec les poteries et faïences Wedgwood de Josiah Wedgwood, grand-père maternel de Charles Darwin et inventeur du management et du marketing.

Aux environs de Sheffield, vers Birmingham, ils vont ainsi créer la première cité ouvrière, les premières polices urbaines, l’éclairage urbain… car ils ont compris que, en inventant de nouveaux moyens de production, ils changeaient la société, ce que va théoriser Marx un siècle plus tard. Ils ont saisi l’ampleur de ce changement dans l’économie et les moyens de production. Et, enfin, ils ont compris qu’ils transformaient la société et la politique, d’où leur politique sociale. Avec la Lunar Society, nous assistons à l’invention des faubourgs et des cités ouvrières, où l’habitat va désormais s’installer autour des lieux de production comme les mines et les usines. Cette organisation va durer quasiment cent cinquante ans, peut-être même un peu plus, avec l’exode rural et l’expansion des faubourgs, jusque dans les années 1950, toujours sur fond d’exode rural – on « monte » en ville – et de tertiarisation commençante de l’économie.

Arrivent les changements que nous avons connus à partir des années 1960, avec l’invention de la banlieue, et de l’expression « métro-boulot-dodo ». L’habitat s’améliore, mais les transports pendulaires commencent à peser sur les temps de vie et l’atmosphère. Si nous avons réduit le temps de travail, ce gain a été complètement absorbé par les temps de déplacement. Les villes nouvelles, les cités-dortoirs, etc., changent radicalement la nature de la ville, imposant notamment un urbanisme dicté par les réseaux de transports qui y sont liés, au premier chef desquels l’automobile. Nous héritons aujourd’hui d’un modèle complètement saturé, comme en Île-de-France et partout autour des grandes villes dans le monde. Nous savons que nous ne pouvons clairement plus continuer ainsi, la pandémie et les confinements nous ayant placés brutalement devant cette crise civilisationnelle.

Comment voyez-vous ces changements qui nous attendent ? À la suite de la pandémie – non terminée –, nous entendons beaucoup parler d’exodes des grandes villes vers des villes plus petites, des milieux plus ruraux…

Le télétravail et les nouvelles formes de travail changeront-ils les choses ? Peut-être, mais il faut être attentif, parce que le travail à distance, ces nouvelles modalités ne vont pas s’appliquer à toutes les professions ni à toutes les générations. Avec l’arrivée de CSP+ dans et autour des villes moyennes – plutôt qu’en milieu véritablement rural –, un rééquilibrage ville-campagnes aura probablement lieu.

Cependant, nous connaissons les effets souvent délétères de la « gentrification » en petite couronne, et la question se pose sérieusement de savoir si ce phénomène ne risque pas de se reproduire dans les villes petites et moyennes. La mixité sociale, cela ne se décrète pas. Les politiques, urbanistes ou architectes en parlent, mais je ne connais pas un seul exemple réussi d’une organisation sociale dictée par « le haut ». L’évolution des villes se joue entre les utopies de l’urbanisme et de l’habitat héritées de la Renaissance – jusqu’à l’architecture fonctionnelle d’un Le Corbusier – et la dystopie des cités de la science-fiction. La grande question va donc consister à accompagner intelligemment ce mouvement, ces flux de population, dont certains inversés, entre les grandes villes, celles plus modestes et les milieux ruraux.

Quand nous parlons de télétravail, nous pensons toujours travail à domicile, mais de nouveaux nomades émergent, passant de ville en ville, de région en région, de ville à campagne, complètement inscrits dans cette nouvelle configuration. Cela promet des changements assez extraordinaires. Je pense qu’il faut que nous réinstallions les nomadismes dans la ville, en termes d’habitat et de mode de déplacement, avec des gens qui viennent, qui partent, qui changent. D’un point de vue éthologique, je crois que nous devrions passer de formes de vies organisées de façon séquentielle domicile-travail-loisirs à des organisations de fusion-fission, comme le font très bien les chimpanzés : fusionner pour des activités exigeant du présentiel, fissionner de diverses façons selon les personnes et les lieux pour des relations ou des tâches plus précises.

Pour revenir à la mixité sociale, la grande question reste celle de l’habitat et de la mobilité, et je trouve que les réflexions ne sont vraiment pas assez avancées sur ce plan. Nous l’avons vu avec la crise pandémique, les gens qui ont fait des études, hommes comme femmes, ont d’emblée su et pu s’organiser de manière assez efficace pour pouvoir travailler, ce n’est pas le cas des personnes exerçant de très beaux métiers, en contact avec les autres – la fameuse « première ligne » –, qui gagnent moins bien leur vie, habitent loin et souffrent parfois d’horaires fractionnés. Comment ces femmes et ces hommes pourraient-ils revenir dans la ville ? Comment la ville de demain va-t-elle pouvoir intégrer ces nouveaux phénomènes de fusion-fission si ces personnes, pour des raisons de revenus, ont malheureusement de plus en plus de difficultés pour accéder à la ville ? Parce qu’évidemment, nous ne voulons pas tomber dans les excès des grandes villes asiatiques, où les gens vivent dans des cellules. Nous n’y pensons heureusement même pas, ce qui n’empêche bien entendu pas l’existence de logements indignes chez nous.

Le premier confinement a été tellement soudain que les gens se sont débrouillés, ils ont poussé les livres, se sont installés sur la table du salon, dans la cuisine, pas toujours avec la meilleure connexion… Mais sur le long terme, cette configuration va poser pour la ville nombre de problèmes, en termes d’architecture, d’efficacité, de connectivité, d’organisation, etc. Comment la ville va-t-elle intégrer ces changements sur le travail et la sociologie de demain ? C’est un vrai problème. L’erreur à ne pas commettre, dans tous les domaines, et le modèle des smart cities nous le confirme, c’est le solutionnisme. Nous ne pouvons pas nous contenter de penser que nous allons résoudre des problèmes bien réels avec davantage de technologie. L’innovation incrémentale est utile et nécessaire, mais tout ne peut pas se limiter à cela, sinon nous ne comprenons pas les enjeux profonds d’une société en train de changer.

Pour moi, l’enjeu serait que l’éthologie et l’anthropologie entrent dans la ville et viennent nous interroger sur les rapports fondamentaux de toutes les sociétés humaines, ce que nous partageons avec les chimpanzés, ce qui nous permettrait de nous organiser et de nous adapter à tous ces changements. Le défi, compliqué mais passionnant, pour les urbanistes, architectes et autres acteurs de la ville, sera de faire en sorte que les habitants et usagers de la ville se l’approprient et la transforment. Au-delà de la dimension citoyenne, nous parlons là de démocratie directe dans l’aménagement de la ville, ce qui n’existe pas encore, et je crois que c’est le gros enjeu politique, économique et anthropologique qui nous attend. Pour résumer cette idée un peu brutalement, soit nous allons vers des quartiers ghettoïsés pour les plus démunis, les riches restant isolés dans leur gated communities, à l’image des Amériques, soit s’installe une dynamique de transformation de la cité favorisant les initiatives des quartiers et de leurs habitants – à l’exemple des centres-villes réinvestis pas les jeunes générations grâce à l’usage des réseaux numériques – en concertation avec les édiles de la ville ; autrement dit, une politique de coévolution.

Quelle serait votre vision de l’évolution future de nos villes ? Plaidez-vous pour l’adoption de logiques écosystémiques ?

Ce que j’aime à rappeler, c’est que nous autres, en Europe occidentale, avons la chance incroyable de ne pas avoir de mégalopole. La plus grande métropole est Londres, ensuite, Saint-Pétersbourg, puis seulement Paris. Nos villes sont encore à dimension humaine, ce qui rend difficile d’imaginer ce que peuvent être São Paulo, Lagos, les villes chinoises ou même les agglomérations de métropoles comme SanSan – San Francisco/San Diego – ou BosWash – Boston/Washington – aux États-Unis. Des centaines de kilomètres de conurbanisation ininterrompue et deux ou trois générations qui n’ont jamais vu la mer ni la campagne… L’une des grandes chances de l’Europe, par-delà le tourisme, est que nous avons conservé des centres-villes historiques, et la capacité de créer un équilibre entre les grandes villes et ce qui les entoure, expérience extraordinaire que ne peuvent plus proposer les mégalopoles. L’enjeu au niveau européen est donc de contenir les régions déjà en phase de conurbanisation.

Nous aimerions que la ville soit complètement impliquée dans une économie circulaire, mais c’est impossibe, car les villes ont toujours été conçues comme un lieu d’habitat et de concentration de pouvoir, dont les ressources venant de l’extérieur étaient rejetées ensuite. Nous sommes depuis peu en train d’abandonner ce modèle pour adopter une logique d’écosystème.
Ce dernier nécessitera une organisation impliquant un maximum de capacité de production et de biodiversité, et, même s’il ne pourra pas l’être complètement, il doit être bio-inspiré. Ce que les gens savent assez peu, par exemple, c’est que l’intelligence artificielle moderne, notamment du big data et du machine learning, est complètement bio-inspirée. La bio-inspiration va plus loin que le biomimétisme qui imite les formes, les structures et les matières : elle s’inspire réellement des processus de la nature. Aujourd’hui, l’enjeu écosystémique consiste à aller chercher des analogies fonctionnelles, réalisables. Et la réflexion systémique est basée sur des codépendances et des flux d’informations, ce qui veut dire qu’il faut arrêter de fragmenter la ville en secteurs d’usages.

Dans l’évolution, quand le monde change, nous n’avons pas tout à inventer, car nombre de choses existent déjà. Les jeunes générations, notamment, prennent des initiatives et sont capables de se réapproprier une partie de ce que la ville ne peut pas faire – aller chercher les enfants, organiser les gardes, etc. –, en s’appuyant sur les capacités numériques de se connecter avec les réseaux. Mais, entre la réalité de la ville physique et sociale et la réalité virtuelle qui se met en place, il ne faut pas non plus tomber dans une dystopie à l’image du génial film de Spielberg, Ready Player One, où les gens vivent dans des villes complètement sinistrées et ne peuvent s’échapper qu’à travers les avatars et le monde virtuel. Il y a le numérique, mais également les savoirs ancestraux, la ventilation naturelle, les systèmes d’ombrage passifs, etc. L’un des pièges de l’idée de progrès est de penser que nous sommes plus intelligents que les autres et que nous serons plus intelligents demain. Non, les autres ont déjà inventé nombre de solutions. Un large échantillon de solutions synchroniques et diachroniques existe aujourd’hui. Je pense, par exemple, à la végétalisation des toits et des façades figurant des métamorphoses rapides, comme à Milan et ailleurs.

Jusqu’à présent, l’idée du progrès, dans tous les domaines – et donc pour la ville –, revenait à planifier et dessiner un grand projet en imaginant que les gens y seraient heureux. Mais aujourd’hui, nous devons vraiment trouver la capacité de mettre en place des formes de coconstruction, pour penser ensemble les enjeux, en n’oubliant pas que, comme dans l’évolution, tout n’est pas à inventer et que, dans l’adaptation, il n’existe jamais une seule solution. Les mutations de Paris ne seront pas celles de Bordeaux ni de Toulouse, et encore moins des mégalopoles. Nous pouvons en revanche autant apprendre des mégalopoles que des petites villes.

La génération de baby-boomers est celle d’un développement des villes jamais connu. Va-t-elle y rester au moment de la retraite ? Nous connaissons la réponse. Mais cette période récente, courte d’un demi-siècle, marque la fin d’une tendance historique qui a poussé des centaines de millions de personnes vers les villes, poumons de plus en plus sclérosés des promesses de travail, de rémunération et de loisirs. Certes, nous n’allons pas connaître un mouvement inverse, mais de nouvelles dynamiques urbaines inscrites dans des problématiques écosystémiques.

La ville n’est donc pas morte. Selon vous, elle ne doit plus se contenter d’évoluer en réponse aux problématiques économiques et sociétales, mais aussi en fonction des évolutions de nos environnements et des changements anthropologiques. L’anthropologie dans la cité, c’est nouveau ?

Si nous observons les sondages récents, les gens ne veulent pas abandonner la ville. Trois générations successives qui n’ont pas vécu à la campagne ne vont pas y migrer comme cela. Nous savons que de plus en plus de Franciliens fuient la région parisienne, parce que la vie y est infernale, notamment en termes de transports, et que les pollutions et les maladies civilisationnelles, en fait les pathologies de la vie citadine, y sont prégnantes. Les gens sont attirés par des villes moyennes, qui offrent toutes les prestations nécessaires ainsi qu’une vraie vie culturelle, sociale et politique. Je crois que nous autres, Européens, devons jouer là-dessus, à condition que nous soyons capables de ne pas rester seulement des pays touristiques, mais de développer également un dynamisme important en termes économiques et d’innovation. Par exemple, et contrairement à ce qui s’est passé avec la révolution industrielle, comment intégrer les nouveaux moyens de production dans les cités en accompagnant les grandes transformations sociétales et environnementales des entreprises ? Comment trouver de nouvelles dynamiques entre les magasins de centres-villes, essentiels à leur dynamisme, et les centres commerciaux en périphérie, qui gâchent la vue aux abords des villes ? La réponse peut se trouver notamment grâce au phygital et à d’autres initiatives écosystémiques entre tous ces acteurs.

Nous n’avons pas encore évoqué un aspect très important, à savoir l’inquiétude qui nous accompagne nous autres anthropologues, et qui va peut-être vous surprendre : ce ne sont pas les huit ou neuf milliards d’individus à l’horizon 2050, pour leur majorité urbains, mais bien ce qui va se passer après. Nous ne sommes pas certains que la population humaine puisse se renouveler démographiquement. Je ne scande pas après les baby-boomers le déluge, mais les profils démographiques des villes vont changer. La pandémie, une fois de plus, montre que les attentes sur la ville varient considérablement pour les jeunes, notamment celles et ceux des classes dites « créatives », pour les familles avec des enfants en bas âge – qui tendent à partir –, les seniors sans enfants et plus aisés… Des changements considérables pour les métiers, les activités et les classes d’âge sont à venir.

Seulement, la ville est devenue malade. Nous allons devoir trouver comment appréhender cette question des maladies civilisationnelles. L’OMS le constate : les pollutions sont devenues la première source de mortalité dans le monde. Nous vivons une véritable inversion : jusqu’aux années 1960-1970, et même 1980, les citadins avaient une espérance de vie plus longue, pour différentes raisons liées à l’habitat, à l’hygiène sanitaire, à l’accès au confort, à la culture et évidemment aux soins. Aujourd’hui, malheureusement, l’espérance de vie s’est en moyenne amoindrie dans les grandes villes par rapport aux campagnes. Et je ne vois pas suffisamment de réflexions sur ces sujets.

J’ai une double vision anthropologique pour la ville, qui peut sembler utopique, mais qui est en fait l’inverse des utopies que nous avons connues. Je propose de laisser la biodiversité, qu’elle soit végétale ou animale, se réapproprier une partie de la ville, en créant notamment des couloirs, de grandes avenues permettant à nombre d’espèces, insectes, oiseaux, voire mammifères, de circuler. C’est ce que j’appelle le paradoxe du paradoxe d’Alphonse Allais, qui disait qu’il faudrait mettre les villes à la campagne, où, paraît-il, l’air est plus pur… Aujourd’hui, le paradoxe du paradoxe, c’est que c’est la campagne, la biodiversité, qui rentre dans la ville. Il faut pouvoir la laisser un peu aller d’elle-même, que nous ayons un regard, mais pas un jardin à la Lamarck, à la française, un jardin à l’anglaise avec des endroits qui puissent être laissés à davantage de nature. Je pense par exemple à l’aménagement d’une grande friche en collaboration avec le Muséum d’histoire naturelle à Toulouse.

Et puis, il y a la ville péripatéticienne, la ville où l’on marche. Il faut que nous pensions des villes où les enfants peuvent courir en toute liberté, parce qu’ils ne le peuvent plus aujourd’hui, et c’est un drame. Nous évoquions l’évolution de la lignée humaine, mais observez : les gens déambulent le regard vissé sur leurs écrans et les oreilles sous des écouteurs. Nous sommes à l’ère des smombies, néologisme composé à partir de smartphone et zombies. Les citadins marchent à rebours de l’évolution de la lignée humaine, que marquaient le redressement progressif du corps et l’acquisition d’une bipédie parfaitement verticale. Nous repartons en arrière. Les piétons ne regardent plus autour d’eux, la tête est rivée sur le sol. Ils sont absents de ce qui les entoure. C’est absolument terrifiant. Qu’avons-nous fait de notre bipédie ? Quand on sait que le parcours moyen à Paris en voiture est de trois kilomètres, ce qui se fait plus vite à pied, nous marchons sur la tête. Si les gens des villes arpentaient ce parcours à pied et montaient les deux premiers étages des immeubles, cela représenterait moins de pollutions et surtout un gain de santé publique considérable, avec une diminution de plus de la moitié de l’obésité par exemple.

À cause de la voiture et maintenant des nouvelles mobilités, s’est installée l’idée que marcher est fatigant… De plus, les trottoirs sont devenus une jungle. Personnellement, je ne supporte pas le fait que nous ne puissions pas marcher plus de dix mètres sans devoir être interrompu. Trois stations de métro sont plus vite parcourues à pied, et c’est bon pour la santé. En plus, la ville est belle, surtout à Paris. Les villes où l’on marche sont celles qui renferment les plus grands auteurs. Pour la créativité ou l’innovation, il faut poser le stylo, éteindre l’ordinateur et aller marcher ; en revenant, le problème sera résolu. Quand je dis « ville péripatéticienne », je n’entends donc pas que marcher, mais un enjeu de société, de civilisation. Les villes devraient à nouveau être conçues pour marcher. Il n’y a pas si longtemps, et encore dans les villes du sud, les gens sortaient le soir pour déambuler, se saluer, discuter… Ce sont les villes du Nouveau Monde, directement conçues pour la voiture, qui nous ont induits en erreur avec le mirage du rêve américain. Et puis, le vrai rêve, le vrai enjeu, est celui d’une ville où les femmes pourraient se promener en toute liberté et plaisir, quelle que soit l’heure de la journée ou de la nuit.

Voilà un immense défi pour la ville : inventer la cité où les femmes seront en sécurité à la fois dans les espaces privés et publics. Libérer la ville de la fureur éthologique des mâles.

Nous nous trouvons face à un enjeu de civilisation et d’évolution. Le développement exponentiel des villes a été compris comme un progrès consubstantiel de l’évolution de nos sociétés, confondant urbanisation et hominisation. Le défi de la ville de demain est d’engager toutes les expériences possibles d’humanisation, c’est-à-dire de favoriser une nouvelle anthropologie des villes. Comment ? En impliquant les urbanistes, les sociologues et les artistes, mais aussi les anthropologues, trop souvent oubliés, car toujours pensés hors des villes. Mais, plus que tout, en se saisissant de toutes les formes de démocraties participatives, facilitées par les usages des réseaux. La révolution numérique modifie déjà toutes les activités de nos sociétés, et je ne vois pas comment la ville pourrait s’en passer. Aux États-Unis, la génération Y réinvestit les centres-villes, partage les voitures, organise les gardes d’enfants, assure la surveillance bienveillante des quartiers. Le modèle de la maison de banlieue, son petit jardin et les voitures pour aller au centre commercial ou au travail avec des embouteillages infernaux, chacun dans son isolement, c’est fini ! Les villes de demain seront celles qui auront su installer des possibilités de créations de réseaux avec des citadins incités à s’approprier la ville, à créer des communautés de fusion et de fission, à développer les mobilités à pied ou avec des pédaliers. Faire des villes des matrices de possibles anthropologiques, et non pas des villes qui prétendent fonder une anthropologie. En d’autres termes, faire que la ville soit une communauté écologique capable de toutes les coévolutions.

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