Diaporama : Campus de l’Université Paris-Saclay, plateau de Moulon, Renzo Piano Building Workshop architecte par Michel Denancé photographe
Campus et entreprises : concurrence et innovation
Les établissements d’enseignement supérieurs partagent désormais avec les entreprises des enjeux de concurrence, tant économiques que scientifiques, pour attirer leurs clients/étudiants, de même que les entreprises luttent pour attirer les talents, dans un contexte de concurrence internationale des formations, soulignée par les classements nationaux et internationaux.
Le campus prend une place centrale pour l’attractivité des établissements, poussant vers une architecture iconique, à l’image des sièges sociaux des entreprises, dont la dimension symbolique d’incarnation des valeurs est devenue centrale. L’enjeu est d’imaginer des espaces hybrides, articulant physique et digital, dans des bâtiments offrant une véritable expérience. « Instagrammable », le campus cherche à faire signe, à développer une image de marque, à incarner des valeurs et créer un sentiment de fierté et de communauté. Il est intéressant de constater que l’université PSLGroupement universitaire réunissant 11 établissements : Collège de France, Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique – PSL, École nationale des chartes – PSL, École nationale supérieure de Chimie de Paris – PSL, École nationale supérieure des Mines de Paris – PSL, École normale supérieure – PSL, École Pratique des Hautes Études – PSL, ESPCI Paris – PSL, Institut Curie, Observatoire de Paris – PSL, Paris-Dauphine – PSL– fondée en 2010, Grand établissement depuis 2022 – qui réunit les établissements majeurs du quartier latin, manque encore d’un lieu d’incarnation unique à la hauteur de son prestige académique, alors même que l’ambition originelle était de renforcer la visibilité internationale de ces établissements.
Les frontières entre l’entreprise et l’école, mais aussi entre le professeur, l’étudiant et le professionnel deviennent poreuses. Ces parcours discontinus sont le reflet d’une évolution du profil et des attentes d’une nouvelle génération. L’étudiant devient un apprenant qui ne reçoit plus un savoir magistral mais devient acteur de son apprentissage. La logique du on demand, devenue la norme de la consommation culturelle, est transposée au contenu pédagogique pour personnaliser les parcours d’apprentissage. Or les espaces traditionnels d’enseignement ont été pensés pour la transmission du savoir selon un modèle vertical, où le professeur sachant inculque un savoir à un apprenant sur les bases d’une relation hiérarchique. L’espace éducatif doit s’adapter à cette mutation. Repenser la forme et la place du campus offre à ce titre des opportunités d’articuler le vertical de la salle de classe ou de l’amphithéâtre, à l’horizontal du social et de l’informel.
Au-delà de son potentiel de flexibilité, le campus doit créer des porosités nouvelles avec la société via des incubateurs, des centres d’innovations, learning center et autres espaces mixtes plus ouverts sur la ville et les entreprises. Situé au centre du campus de l’École polytechnique de Lausanne, le Rolex Learning Center est ainsi tout à la fois un espace dédié à la connaissance, une bibliothèque et un lieu d’échanges culturels. Il est ouvert aussi bien aux étudiants qu’au public, leur offrant services, bibliothèques, centres d’information, lieux d’études, restaurants, cafés et extérieurs de qualité. Aalto university, en Finlande, a de son côté créer une « université de l’innovation » en fusionnant trois institutions (une école de design, d’ingénieur, et une business school) et en les faisant migrer vers un campus unique, financé par des fonds publics et privés, où sont favorisés les cursus transdisciplinaires, l’esprit entrepreneurial et l’apprentissage par le prototypage. Nous voyons enfin apparaître des modèles résolument hybrides comme l’IXcampus, qui héberge CY école de design à Saint-Germain-en-Laye, autour du parc du Château Saint-Leger, en parallèle d’un écosystème de start up.